Esquisse #12 Brasier

« L’idée initiale de Brasier m’est venue la nuit d’un incendie. À cet incendie, je n’étais pas. C’était la nuit et j’étais à mon poste dans une usine. Je m’imaginais souvent un incendie se déclencher.Certainement un réflexe animal de survie anticiper le pire. Cette nuit-là, je suis allé boire un café et regarder les dernières nouvelles du monde sur mon téléphone. L’incendie de Grenfell était en cours  à Londres.
Toute la nuit, j’ai tenté de me mettre à la place des victimes. Celles et ceux qui perdent leur cocon, leurs souvenirs, leurs proches. Je me suis mis à inventer des histoires pour passer le temps. Leurs histoires et les conséquences de ce drame sur leurs histoires. Comme ces gens de l’ombre, je vis dans un immeuble. J’ai songé à mon immeuble incendié. Dans l’immeuble où je vis, pas d’extincteur. Pas de fenêtres. L’unique escalier est bientôt condamné.
Alors, je vois une foule courant vers l’escalier. Et ce que j’imagine être moi, nageant à contre-courant dans la marée humaine. Happé par l’appel d’un cri. Les yeux rivés sur une porte de laquelle s’échappent des fumées.
Et derrière la porte quelqu’un qui crie. Je sais que quelqu’un qui m’est cher est pris au piège mais ne sais pas qui.
Ça pourrait être n’importe qui. Le cri de qui ?
L’étincelle de cette fiction est donc ce drame que j’ai vécu en direct mais à distance par le prisme médiatique. Alimentée, l’étincelle s’est ensuite transformée en flamme, et ainsi le drame réel déroulé par les médias s’est métamorphosé en fiction. Au fil du temps, des personnages sont nés au plateau d’une recherche documentaire combinée à la créativité d’une dizaine de comédien.ne.s ». – Vincent Bellée